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Moyen-Orient: la Cour pénale internationale émet des mandats d'arrêt contre Netanyahu, Gallant et le chef de la branche armée du Hamas


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Publié le Dim 24 Novembre 2024 16 Vue(s) [138 articles]


Benyamin Netanyahu

La chambre préliminaire de la Cour pénale internationale a émis le jeudi 21 novembre des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité qui auraient été commis dans la bande de Gaza, a annoncé la CPI jeudi.

Elle a également émis un mandat d'arrêt contre le dirigeant de la branche armée du Hamas, le Palestinien Mohammed Deif. 
« La Chambre a émis des mandats d’arrêt contre deux individus, M. Benyamin Netanyahu et M. Yoav Gallant, pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis au moins à partir du 8 octobre 2023 jusqu’au 20 mai 2024 au moins, jour où l’accusation a déposé les demandes de mandats d’arrêt », a déclaré dans un communiqué la CPI, qui siège à La Haye, ajoutant dans un autre communiqué qu’un mandat a également été émis contre Mohammed Deif, le chef de la branche armée du Hamas.

Ces accusations concernent la riposte israélienne meurtrière qui fait suite aux attaques perpétrées par le Hamas le 7-Octobre. La CPI dit avoir « des motifs raisonnables de croire » que M. Netanyahu et M. Gallant « portent la responsabilité pénale » des crimes suivants : « le crime de guerre consistant à utiliser la famine comme méthode de guerre », « crimes contre l’humanité » parmi lesquels des « meurtres, persécution et autres actes inhumains » et la perpétration d’« attaques intentionnellement dirigées contre la population civile ».Ces mandats d’arrêts sont un évènement, car c’est la première fois que la CPI réclame l’arrestation d’alliés des occidentaux, et des États-Unis en particulier, rapporte notre correspondante à La Haye, Stéphanie Maupas.

Concernant Mohammed Deif, architecte des tunnels de l’enclave palestinienne et accusé d’être le cerveau de l’attaque du 7 -Octobre, il a été tué, selon Israël, lors d’une frappe de l’État hébreu le 13 juillet dernier. Mais la CPI, estimant « ne pas avoir la preuve de sa mort », a décidé d’émettre à son encontre aussi un mandat d’arrêt, car elle a, selon le communiqué, « des motifs raisonnables de croire » qu’il est responsable de « crimes contre l’humanité » comme « le meurtre, l’extermination, la torture, le viol et d’autres formes de violence sexuelle », ainsi que des crimes de guerre « que sont le meurtre, les traitements cruels, la torture, la prise d’otages, les atteintes à la dignité de la personne, le viol et d’autres formes de violences sexuelles ».

Les mandats d’arrêt ont été classés « secrets » afin de protéger les témoins et l’intégrité de l’enquête. Mais « la chambre considère qu’il est dans l’intérêt des victimes et de leurs familles qu’elles soient informées de l’existence des mandats », a-t-elle expliqué. Le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan a appelé les États parties à « se conformer » aux mandats d'arrêt émis à l'encontre de Benjamin Netanyahu, Yoav Gallant et Mohammed Deif. « Je lance un appel à tous les États parties pour qu'ils respectent leur engagement à l'égard du Statut de Rome en respectant et en se conformant à ces ordonnances judiciaires », a-t-il déclaré dans un communiqué.

Selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza ce jeudi, le bilan est de 44 056 morts dans le territoire palestinien depuis le début de la guerre avec Israël il y a plus d’un an. Et au moins 71 personnes ont été tuées ces dernières 24 heures, a-t-il indiqué dans un communiqué, ajoutant que 104 268 personnes avaient été blessées dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre, déclenchée par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Israël dénonce des « ordonnances absurdes »


Israël n’a pas perdu de temps pour réagir. Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, a déclaré que la CPI a « perdu toute légitimité » en émettant des « ordonnances absurdes ». « C’est un jour noir pour [la CPI], qui a perdu toute légitimité à exister et à agir », a écrit M. Saar sur son compte X. Le tribunal de La Haye « s’est comporté comme un jouet politique au service des éléments les plus extrêmes œuvrant à saper la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient », a ajouté M. Saar. 

Benyamin Netanyahu, lui, a qualifié d’« antisémite » la décision de la CPI, s’estimant victime d’un nouveau « procès Dreyfus ». Il a également dit qu’il ne « cédera pas à la pression » tant que les objectifs de guerre d’Israël ne seront pas atteints. 

Le chef de l’opposition israélienne Yaïr Lapid a également « condamné » la décision du tribunal de La Haye. Sur X, il a aussi dénoncé une « récompense pour le terrorisme ».

Cette décision « met l'État d'Israël et les dirigeants meurtriers du Hamas sur le même plan et légitime ainsi le meurtre des bébés, le viol des femmes et l'enlèvement des personnes âgées dans leur lit même », a réagi Yoav Gallant dans un message sur X. Elle « crée un dangereux précédent contre le droit à se défendre soi-même et à mener un guerre morale, et elle encourage le terrorisme meurtrier », ajoute-t-il.

Le mandat d'arrêt contre Mohammed Deif « est extrêmement important. Cela signifie que la voix de ces victimes est entendue », a déclaré Yael Vias Gvirsman, qui représente les familles de 300 victimes israéliennes de l'attaque du 7-Octobre menée par le Hamas. « Ce tribunal a une grande responsabilité. Pour nous, ce ne sont que les premiers pas. C'est un long processus », a ajouté Mme Gvirsman, qui est également une avocate représentant des victimes à la CPI.

De son côté, le Hamas a salué l’émission de mandats d’arrêt contre Netanyahu et son ex-ministre de la Défense, la qualifiant d’« étape importante vers la justice qui peut permettre aux victimes d’obtenir réparation ». « Mais elle reste modeste et symbolique si elle n’est pas pleinement soutenue par tous les pays du monde », a déclaré Bassem Naïm, membre du bureau politique du Hamas, sans faire aucune mention du mandat d’arrêt annoncé simultanément contre Mohammed Deif.

« Les États-Unis rejettent catégoriquement la décision de la Cour (pénale internationale) d'émettre des mandats d'arrêt contre de hauts responsables israéliens », a réagi un porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.

« Nous restons profondément préoccupés par l'empressement du procureur à réclamer des mandats d'arrêt et par les erreurs troublantes dans le processus qui a mené à cette décision », a-t-il ajouté dans une réaction transmise à l'AFP, en répétant que selon Washington « la CPI n'était pas compétente juridiquement dans cette affaire. »

De son côté, l'Argentine estime que les mandats d'arrêts de la CPI « ignorent le droit légitime d'Israël à se défendre ». Dans un communiqué diffusé sur le réseau social X par le président Javier Milei, la présidence déclare qu'« Israël est confronté à une agression brutale, à des prises d'otages inhumaines et au lancement d'attaques aveugles contre sa population. Criminaliser la défense légitime d'une nation tout en omettant ces atrocités est un acte qui fausse l'esprit de la justice internationale. »

Le chef de la diplomatie européenne affirme que les mandats d'arrêt émis par la CPI doivent être « respectés et appliqués »
Josep Borrell, le chef de la diplomatie européenne, a affirmé que les mandats d'arrêt émis par la Cour pénale internationale contre Benyamin Netanyahu, l'ex-ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, et le chef militaire du Hamas, Mohammed Deif, devaient être « respectés et appliqués ».

« Ce n'est pas une décision politique », souligne Josep Borrell. « C'est une décision d'une cour, d'une cour de justice, d'une cour de justice internationale. Et la décision de la cour doit être respectée et appliquée », a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse à Amman avec son homologue jordanien, Aymane Safadi.

Le ministre italien de la Défense Guido Crosetto a déclaré que l’Italie serait obligée d’arrêter le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu en cas de visite dans le pays, après le mandat d’arrêt émis par la CPI. Le ministre, dont le pays occupe cette année la présidence tournante du G7, a déclaré à la télévision italienne que la CPI avait « tort » de mettre les deux dirigeants israéliens au même niveau que le Hamas. Mais si M. Netanyahu ou son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant « étaient amenés à se rendre en Italie, nous serions dans l’obligation de les arrêter », en vertu du droit international, a-t-il néanmoins affirmé.

Ce n’est pas un choix politique, mais l’Italie est tenue, en tant qu’État partie au Statut de Rome, fondateur de la CPI, d’exécuter ses mandats d’arrêt, a expliqué M. Crosetto. Le ministre des Affaires étrangères, Antonio Tajani, s’est montré plus prudent, déclarant que « nous soutenons la CPI, en gardant en tête que la Cour doit jouer un rôle juridique et non politique ». « Nous devons réfléchir ensemble, avec nos alliés, à notre réaction et à notre interprétation de cette décision. »

Pour la secrétaire générale de l'ONG Amnesty internationale Agnès Callamard, « les États membres de la CPI et l'ensemble de la communauté internationale doivent tout faire pour que ces individus comparaissent devant les juges indépendants et impartiaux de la CPI », commente-t-elle dans un communiqué.

Ne disposant pas de force de police, la Cour pénale internationale compte sur la coopération des États pour obtenir l’arrestation des mis en cause. Les 124 pays ayant ratifié le traité de Rome ont l’obligation, normalement, d’interpeller les individus visés par un mandat de la CPI. Ces mandats devraient donc compliquer les futurs déplacements des responsables israéliens même si, dans les faits, la Cour ne peut obliger les États à coopérer. Ainsi, le président russe Vladimir Poutine, visé par un mandat d’arrêt pour le conflit en Ukraine, s’était rendu en Mongolie en septembre dernier sans être inquiété. Un manquement qui avait été vivement déploré par la Cour pénale internationale.

 

RFI

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